Rassemblés en un seul volume, les deux livres majeurs du plus grand poète arabe contemporain donnent la mesure d´une œuvre qui ne cesse d´imposer son originalité et son intrépide liberté. Les Chants de Mihyar le Damascène s´élèvent à la faveur d´une double généalogie : celle des grands inspirés de la modernité occidentale (Hölderlin, Rilke, Michaux) et celle que distille l´héritage arabe, en ses voix libertaires (Hallâj, Niffari). Imprégné des dits soufis, énigmatiques paroles d´extase ou de frayeur qui grandissent dans le cœur des possédés, Adonis n´a recours à aucun intermédiaire divin pour réaliser sa quête. Le poème est le témoin privilégié de son feu intérieur. Distinguant la religiosité de la croyance, son discours oraculaire déroute le dogme. Orphelin de l´être, son mysticisme n´est plus en Dieu. Telle s´entend, lucide entre toutes, la voix mythique de Mihyar sur les chemins de l´exil. Avec Singuliers, Adonis entend rejouer, réinventer à sa manière passablement iconoclaste, le jeu de la Création. Il compose un poème singulier, arbre touffu, delta ramifié, où c´est la dispersion même qui façonne l´unique. Un poème-corps, qui embrasse autant de destins que nécessaire pour fomenter sa genèse, son histoire et l´espace alchimique de son verbe.
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