"C´est sans doute un titre ambitieux que celui qui propose ainsi une ample synthèse accolant deux continents. Et un titre apparemment provocant, puisque, à un moment où les frontières du Tiers-Monde sont souvent remises en cause en raison de leur nature arbitraire, artificielle, il serait encore question, en quelques minutes, ou en quelques pages, de consolider l´explication par les origines. En fait la perspective, sur ces deux points, sera plus simple. L´Europe ne s´entendra, bien entendu, qu´en un sens restreint, le terme désignant moins la multiplicité et la diversité des États que l´utilisation d´une certaine notion de frontière, d´extraction européenne, et mise en œuvre, à l´époque des premières tentatives ou des premiers actes de délimitation, par la France. L´étude même, d´autre part, de la genèse ne saurait passer pour superflue : on comprendrait mal en effet comment des frontières, aussi arbitraires (par rapport aux réalités géographiques, sociologiques, économiques, culturelles) qu´elles apparaissent, aient pu à ce point se maintenir à travers tous les obstacles, si l´on ne prenait garde, pour les années 1840¬1900 par exemple, que leur implantation s´est inscrite dans une logique, dans un système, eux, parfaitement cohérents: de là sans doute leur force de survie. En un mot, il n´est peut-être pas inutile de reprendre cette genèse, ou plutôt cette étape de la genèse qui est celle du XIX"" siècle. C´est le moment, en effet, où une certaine notion de frontière passe de l´Europe au Maghreb (ce qui ne revient nullement à affirmer que les notions de frontière, de territoire, n´ont pas au Maghreb une histoire bien antérieure: cette dernière question, fondamentale, ne sera pas abordée ici)."
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