Etat francophonie dans le monde

"Ma Francophonie est d´abord une riveraine. Les flots verts et bleus du lac Neuchatel au bord duquel j´ai passé mon enfance étaient entraînés vers le Nord et le Rhin. Sous le Léman que je contemple en écrivant passe le ruban bleu du Rhône : lui coule en direction de la Provence, de la Méditerranée, de l´Afrique. Ici, néanmoins, il n´est pas encore très loin du massif du Gotthard, sa source voisine avec celle du Rhin, et d´où jaillissent encore de moindres cours d´eau. Les Suisses ne sont pas seulement quadrillés par la grille des cantons: la nature elle-même les rend attentifs aux vallées, replis, entrelacs, cols, transitions, voisinages, rivalités, pentes et rives opposées. Ils essaient de s´en sortir par la neutralité (attitude politique) et quelquefois par l´insularité (attitude mentale), mais certains d´entre eux possèdent aussi le sens de la non-exclusion, c´est-à-dire de la confédération. Le premier Sommet francophone à d´ailleurs fait renaître entre eux des tensions qu´à l´époque ils croyaient oubliées (et que l´intégration européenne allait rendre carrément douloureuses) : fallait-il que Berne, si j´ose dire, aille à Paris? La réponse fut d´abord non. Puis, sous une forte bise de protestations romandes, ""oui mais"" : on se ferait représenter pat un observateur muet. Au fil des sommets suivants, grace à Dieu, l´observateur se mit à parler. La Suisse entrait dans le jeu, et comprenait enfin ce qu´il fallait comprendre : toutes les affinités doivent être entretenues, toutes les amitiés sont bonnes à nouer, et tous les ensembles´ peuvent concourir à l´harmonie universelle. C´est d´ailleurs un célèbre Neuchatelois, Denis de Rougemont, qui voulut abolir le système rigide et dangereux des Etats-Nations, et leur substituer des régions à géométrie variable. Or, son idée reste féconde lorsque on donne au mot ""région"" le sens, qu´en science politique il possède aussi, de ""vaste zone de la planète"" : ainsi le Canada, qu´on sait à la fois membre du Commonwealth, acteur de la Francophonie et signataire de l´accord de libre-échange américain, montre de quelle manière un pays peut appartenir à plusieurs de ces zones, et passer de l´une à l´autre au gré des intérêts en jeu. Existe-t-il une autre manière, un autre espoir de ramener un peu d´ordre, enfin, dans les affaires de l´humanité?"
"Ma Francophonie est d´abord une riveraine. Les flots verts et bleus du lac Neuchatel au bord duquel j´ai passé mon enfance étaient entraînés vers le Nord et le Rhin. Sous le Léman que je contemple en écrivant passe le ruban bleu du Rhône : lui coule en direction de la Provence, de la Méditerranée, de l´Afrique. Ici, néanmoins, il n´est pas encore très loin du massif du Gotthard, sa source voisine avec celle du Rhin, et d´où jaillissent encore de moindres cours d´eau. Les Suisses ne sont pas seulement quadrillés par la grille des cantons: la nature elle-même les rend attentifs aux vallées, replis, entrelacs, cols, transitions, voisinages, rivalités, pentes et rives opposées. Ils essaient de s´en sortir par la neutralité (attitude politique) et quelquefois par l´insularité (attitude mentale), mais certains d´entre eux possèdent aussi le sens de la non-exclusion, c´est-à-dire de la confédération. Le premier Sommet francophone à d´ailleurs fait renaître entre eux des tensions qu´à l´époque ils croyaient oubliées (et que l´intégration européenne allait rendre carrément douloureuses) : fallait-il que Berne, si j´ose dire, aille à Paris? La réponse fut d´abord non. Puis, sous une forte bise de protestations romandes, ""oui mais"" : on se ferait représenter pat un observateur muet. Au fil des sommets suivants, grace à Dieu, l´observateur se mit à parler. La Suisse entrait dans le jeu, et comprenait enfin ce qu´il fallait comprendre : toutes les affinités doivent être entretenues, toutes les amitiés sont bonnes à nouer, et tous les ensembles´ peuvent concourir à l´harmonie universelle. C´est d´ailleurs un célèbre Neuchatelois, Denis de Rougemont, qui voulut abolir le système rigide et dangereux des Etats-Nations, et leur substituer des régions à géométrie variable. Or, son idée reste féconde lorsque on donne au mot ""région"" le sens, qu´en science politique il possède aussi, de ""vaste zone de la planète"" : ainsi le Canada, qu´on sait à la fois membre du Commonwealth, acteur de la Francophonie et signataire de l´accord de libre-échange américain, montre de quelle manière un pays peut appartenir à plusieurs de ces zones, et passer de l´une à l´autre au gré des intérêts en jeu. Existe-t-il une autre manière, un autre espoir de ramener un peu d´ordre, enfin, dans les affaires de l´humanité?"
Caractéristiques
Nb Page 543
Dimensions 0 cm x 0 cm x 0 cm
Couverture Broché
Date de Parution 1 janv. 1993
Editeur Documentation Francaise Editions
Poids 0.89
EAN13 9782110030269
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