"Farida s´éveille parce que ses orteils dépassent de la couverture. Habitudes: une veilleuse pour repousser la nuit, une couverture pour étouffer le matin, mais pas une seule, ""des"" couvertures, et un drap, tirés sur sa tête, remontés, enroulés: blockhaus. Evidemment les pieds ... Un renvoi stomacal acide déshabille sa mémoire, déchire les derniers haillons d´un rêve. Elle résiste, crispe les paupières. Février, vacances universitaires, pas d´hôpital aujourd´hui, tant mieux, mal aux reins, mauvaise période du mois, mal à la vie, solitude. Par une meurtrière, minuscule, taillée à l´angle inférieur de l´oreiller, pour espionner la chambre vide et verrouillée, Farida aspire, comme le drogué qui n´ouvre pas les yeux avant d´avoir palpé la seringue, une bouffée de sécurité-illusion sous forme de pain-qui-cuit-et-café, le piège de tous les jours, qui vous fait ouvrir les yeux puis la porte, puis la bouche et ainsi de suite jusqu´à la couverture, jusqu´au verrou du soir. Un parfum de confort, de maison bien tenue, d´affection, glissé sous la porte comme le premier mensonge de la journée. La maison est chauffée: de petites gouttes de buée, contre le clair grisailleux du jour, attestent au carreau qu´on est bien mieux dedans. Les enfants qui jouent dans la rue crient et cognent contre la grille en fer du jardin, comme chaque matin. Farida plie les genoux, remonte les jambes là-où-c´est-chaud, vers le milieu du lit."
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