Yamina MECHAKRA est sans conteste l´une des meilleures romancières maghrébines. Elle marquera son temps d´une empreinte indélébile si tant est que parmi nous reste très incrusté le sourire si douloureux soit-il d´une ame qui nous renvoie notre image aussi claire que possible.Plus que des «souvenirs», aussi poignants que tragiques, ces pages relatent le parcours d´un étudiant Algérien, grandi dans l´injustice coloniale, conscientisé au combat libérateur, devenu communiste au gré d´un séjour d´études en RDA, puis leader du mouvement étudiant à l´indépendance, arrêté puis torturé après le coup d´État du 19 juin 1965 et qui tente ici, en réveillant sa mémoire, de reconstituer les fils d´une histoire qui à conduit beaucoup de jeunes Algériens de son époque à «traverser le miroir». C´est la simplicité de ce récit qui en fait la force. Aucun pathos ici, ni lyrisme, ni trop grande effusion. Les mots sont simples, délicatement posés, détachés, sans haine ni fracas, comme on effeuille sa mémoire. Pourtant si les phrases ne cognent pas sur la page blanche, si l´écriture n´emprunte ni afféterie, ni rhétorique, ce livre qui se veut un témoignage - dans ce que cela à de singulier - est bien plus que cela, car beaucoup - et quelle que soit leur opinion sur cette période - y rencontreront des fragments de leur passé. Au-delà de la modestie du projet de l´auteur et de la subjectivité de son récit, ce livre parle à une génération intellectuelle de l´indépendance de l´Algérie qui joua - et pour certains, joue encore - un rôle particulièrement important fait de heurts doctrinaux et politiques, de passions partagées, de luttes dans/pour le Pouvoir ou dans l´opposition, de vives discussions intellectuelles et culturelles, d´illusions, d´échecs comme l´ont été souvent les projets libérateurs de transformation du monde ... Nourredine Saadi
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