Dans « la Genèse de l´oubli », les personnages évoquent par leurs noms l´antique légende des Journées glorieuses des Arabes, époque héroïque de paganisme et de courtoisie. Voici d´abord Madyan, médecin idéaliste, drapé dans le manteau du rêve et du fantastique. Sa femme Layla, dont le nom rappelle l´héroïne de l´amour courtois arabe est, elle, tendre et réceptive. Leur servante Hind (autre nom préislamique) et la mystérieuse magicienne au nom barbare, Ranjahad, sont les deux autres personnages de ce récit.Le thème central en est la recherche de l´oubli. Madyan se voit envahi par le tenace souvenir d´une femme adorée que la mort lui à ravie. Il voudrait la rejoindre, au grand dépit de sa femme Layla, sensible et surtout jalouse d´un passé qu´elle n´a pas partagé. Il est également envahi par l´idée de la mort, tout comme le héros de « La mort à Venise » de Thomas Mann.Les personnages de « La Genèse de l´oubli » sont prétextes à disserter de problèmes métaphysiques, très peu abordés jusqu´ici par la littérature arabe contemporaine. Le thème de l´oubli qui réside dans la mort est traité avec art, non sans que Messaadi lui donne un support concret. Il ne s´agit donc pas d´un roman métaphysique de pure abstraction. On y trouve de temps en temps, de charmants tableaux méditerranéens qui évoquent un Matisse ou un Van Gogh. C´est ainsi qu´on voit Madyan et Layla devant une table chargée de fruits charnus et « méditerranéens ». Le héros est frappé de tant de magnificence, de couleurs, de charnel, d´humain. Et il pense à l´inexorable ver qui niche au cœur de ces corps magnifiques. Le ver qui se nourrit de cette abondance frugale, c´est la mort en nous. Abstrait et concret s´unissent ainsi dans ce roman philosophique, d´une lecture difficile pour des lecteurs non avertis, malgré la limpidité de cette traduction.
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