« Allons ! Que soit hissé l´étendard de la félicité de la gnose dans l´univers de la contemplation en l´honneur des souverains de l´amour divin! Que soit joué l´accord de la chanterelle et de la basse sur le luth des attributs avec le plectre des secrets dans l´assemblée spirituelle des ames sanctifiées !... Que, dans les solitudes de la pauvreté humaine, chaque néophyte de la voie tente sa chance au jeu d´échec de l´invocation du Bien-Aimé !... Que la table de ces contemplatifs soit apprêtée sur l´estrade de la providence en vue du banquet de l´ardent désir ! » Ainsi s´ouvre Le Traité de l´Esprit saint (Risalat al-Quds) de Rûzbehan de Shîraz (1128-1209), un des plus profonds maîtres du soufisme iranien, contemporain d´Attar, précurseur de Rûmî et interprète de Hallaj, le célèbre soufi martyr de Bagdad. Cette oeuvre vibrante et inspirée se présente comme une rhapsodie mystique. En douze variations thématiques Rûzbehan récapitule dans son style inimitable l´excursus des ames qui se vouent à la quête du Bien-Aimé, en se plaçant sous la gouverne de l´Esprit saint, conçu comme le Guide intérieur, qui seul peut les reconduire à la source éternelle. « Dieu est Beau, Il aime la Beauté », dit une tradition prophétique (hadîth). Cette Beauté est la théophanie essentielle que Rûzbehan compare à l´apparition d´une rose mystique dans le « jardin du coeur ». Là réside le secret de la contemplation bienheureuse. Henry Corbin, traducteur du jasmin des fidèles d´amour (1958), fut le premier à révéler l´importance de Rûzbehan parmi les grands témoins du soufisme iranien de l´époque classique.
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